BIBLE
Terme prétentieux servant à désigner un document plein de belles intentions, qui explique en long et en large (surtout en large) l'univers que l'auteur souhaite explorer (terre! terre!), la psychologie de personnages tous plus nuls les uns que les autres et qu'on décrira avec des gants blancs qui à défaut de faire le bonheur de tous, ne choquent personne. Par exemple, il vaut mieux écrire, "Georgette, 34 ans, souffrant de graves carrences affectives" plutôt que "elle couche avec tout le monde". Inscrire également une liste exhaustive des décors (qui de toutes façons vous seront coupés de moitié) dans lesquels vos créatures pécheresses pourront commettre leurs crimes. Ah et puis une vague notion de l'action à venir aide toujours le lecteur à visualiser le potentiel de l'idée magnifique (forcément) qui vous habite. D'accord, Georgette couche avec tout le monde mais avec qui exactement? Quelle sera sa courbe dramatique (dramatique, forcément dramatique pour paraphraser Duras)?
Courbe est un autre mot prétentieux pour décrire la "vision" de l'auteur inspiré quant au destin magnifique qui attends ses personnages. Je vais leur dire que la courbe sera riche en rebondissements, même si je sais très bien que pour le moment les seules courbes en vue seront celles de Lucie Laurier, se dit l'auteur égrillard. Note au lecteur, le scénariste moyen est un animal libidineux qui rêve trop et qui ne fait pas la moitié, le quart, le dixième, de la teneur de ses rêves orgiaques.
Je soupçonne fortement Miller (Henry, pas Arthur) d'avoir été un grand parleur et un moyen faiseur. Pendant ce temps, Arthur, un obsédé des grands enjeux sociaux, de la lutte des classes et de la grandeur statuesque face au McCarthysme, s'est quand même tapé Marilyn.
En clair, la bible est un document qui contient autant de pages que de bullshitt et qui sert principalement à rassurer tout le monde. Sauf l'auteur qui sait pertinement, que de toutes façons, il va être obligé de tout changer même s'il s'est forcé le pompon pour faire de très jolies phrases.
La seule vraie valeur d'une bible, c'est que c'est le seul truc dans la vie où on est plutôt bien payé pour faire des promesses qu'on ne tiendra pas.
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